XVIIe-XVIIIe siècles
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Le dénouement de la guerre d’indépendance américaine fit monter l’intérêt que la France portait à la nouvelle république et suscita la publication d’une multitude de travaux. La guerre que se livrèrent l’Angleterre et la France prit bientôt fin. Lassés par ses efforts, la France se trouvait chargée de nouvelles dettes. A Genève, le conflit politique atteignit une telle intensité que la guerre civile sembla inévitable. Elle fut évitée de justesse par la ferme intervention de la France, de la Sardaigne et du canton de Berne. Pendant ce temps, en Autriche, Joseph II modifia sa politique religieuse en proclamant un édit de tolérance, la liberté du culte, confisqua des propriétés ecclésiales et ferma des établissements religieux qu’il jugeait superflus. Rencontrant Pie VI, venu à Vienne, il resta inflexible. Quoique l’intérêt suscité par ces différents mouvements révolutionnaires fût grand, il ne surpassa pas l’enthousiasme qui accueillit le lancement des ballons de Montgolfier en 1783. D’une façon moins spectaculaire, d’autres savants contribuaient alors aux progrès scientifiques, notamment Buffon, Lacépède et Lavoisier. Deux œuvres littéraires remportèrent, lorsqu’elles parurent en 1782, un succès considérable qui ne s’est pas démenti depuis: Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos et les Confessions de Rousseau. Les idées que Voltaire et Rousseau avaient défendues trouvaient une application dans les ouvrages d’écrivains aussi divers que La Harpe, Mirabeau, Marmontel, Mercier et Rétif de La Bretonne. Toutefois, la condamnation de l’injustice, l’idée dominante de l’œuvre de Voltaire et de Rousseau, trouve sa plus puissante expression dans les Mémoires sur la Bastille (1783) de Linguet.
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Rédigées vers 1734, les Réflexions sur la Monarchie universelle en Europe actualisent alors l’anti-absolutisme des Considérations sur les causes de la grandeur des Romains (1734) et s’inscrivent dans la genèse de l’Esprit des Lois (Genève, 1748). Expression de la philosophie des Lumières qui prend forme avec la publication des Lettres persanes (1721), ce texte incisif, oublié puisque Montesquieu en détruisit toute l’édition, montre que l’instabilité de l’État naît avec l’esprit de conquête: la “monarchie universelle” représente le stade suprême de l’absolutisme avant son déclin. En synthétisant l’histoire européenne entre la chute de Rome, ruinée par son hégémonie, et le déclin de la France belliqueuse de Louis XIV, Montesquieu plaide pour une Europe pacifiée, débarrassée de ses “mercenaires”, ordonnée par des lois adaptées aux mœurs et unie dans le commerce réciproque, matrice de la paix entre les nations. Avec cette histoire philosophique du droit des gens qui récuse tout providentialisme, Montesquieu adhère à la modernité politique à laquelle aspirent les Lumières en condamnant la guerre offensive et l’hégémonie d’un État sur un autre. Donnant tout son sens au thème montesquien de la modération, la Monarchie universelle en Europe constitue une source importante pour l’histoire critique de l’hégémonie militaire et politique.
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Il est maintenant établi que les différents ouvrages de Robert Challe ont amené à redéfinir les limites des genres littéraires français au XVIIIe siècle. Ainsi, le genre romanesque s’ouvre désormais avec les Illustres Françaises, et celui des journaux intimes ou des confessions avec le Journal de voyage aux Indes, de Robert Challe. Enfin, le siècle de la “philosophie” a trouvé une expression aussi précoce que frappante avec les Difficultés sur la religion proposées au père Malebranche. Mais s’il n’est pas une thèse de cet ouvrage qui ne se retrouve plus tard chez Voltaire, il est aussi le seul, dans la littérature “clandestine”, à retracer l’itinéraire biographique et spirituel qui a conduit son auteur d’un catholicisme dévot à un rationalisme encore marqué par ses origines religieuses. C’est une des nouveautés de la présente édition que de dégager ce déisme quasi-évangélique des falsifications qui en avaient fait, sous le titre menteur du “Militaire philosophe”, un bréviaire du matérialisme de Naigeon. La présente édition des Difficultés sur la religion d’après un manuscrit enfin fidèle et complet couronne la publication dans les Textes Littéraires Français (voir les n° 400, 438, 466 et 494) des œuvres du digne interlocuteur de Nicolas Malebranche.
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Les années 1712-1714, les dernières de cette Correpondance ont un accent tragique et apaisé. Fénelon voit ses espoirs brisés par la disparition de ses meilleurs soutiens : avec la mort du Dauphin, son ancien élève, disparaissent le rêve fénelonien d’un renouveau du royaume et toute perspective de jouer un rôle dans une politique inspirée par l’esprit du Télémaque ; avec celle des ducs de Chevreuse et de Beauvillier, Fénelon perd la possibilité de se faire entendre au Conseil du roi. S?il peut, grâce au retour de la paix, se consacrer à ses tâches pastorales et au projet de construction de son séminaire, son souci majeur est de contrer, au delà même de son diocèse, l’influence janséniste. Ses interventions à Versailles et ?g Rome contribuent certes à la publication de la bulle Unigenitus, mais il faut ensuite faire recevoir la bulle par les évêques de France malgré les atermoiements de l’archevêque de Paris, Noailles, et c’est avant d’avoir pu triompher de ce dernier dans un concile national que la mort le frappe.